L’économie de partage ou de saccage?

Économie de partage

Je me souviens d’un emploi d’été comme répartitrice pour une coopérative de taxi. Une compagnie qui travaillait selon une formule de partage des coûts communs et qui opérait un modèle de vraie collaboration… j’avais 30 patrons!!. J’en garde toutefois un souvenir marquant. C’était un travail de pieuvre en vérité (voir pourquoi plus bas). Un milieu hyper difficile pour une jeune femme à l’époque. Je parle d’il y a plus de 30 ans. Les chauffeurs (tous des hommes) ne me la rendaient pas facile dans ce milieu hyper contrôlé, et où chaque course était si attendue. Une industrie qui n’a guère évolué si je me fie aux discussions avec les chauffeurs au fil des années. J’imagine aujourd’hui avec la concurrence loyale, et parfois déloyale, qui pousse le vent du changement, qu’une réforme était inévitable. Après tout, cette industrie archaïque a bien mérité qu’on lui ébranle les colonnes du temple. Bien non finalement! Une nouvelle loi votée au Québec vient renforcer leur archaïsme… ou bien vous faites comme eux, ou bien allez jouer ailleurs!

Les vents, que dis-je, les ouragans UBER, AirBnB et cie!

Après l’Alberta, le Québec a lui aussi mis des bâtons dans les roues pour les services de transport à caractère communautaire, ce qui sonnera sans doute le glas d’UBER au Québec. L’Allemagne a également sorti les crocs contre l’hébergement libre, de sorte qu’AirBnB n’y connaîtra qu’un déclin dans les prochains mois étant dorénavant quasi impossible de contourner les règles. Et ainsi souffle les vents du statu quo un peu partout dans le monde en guise de contrôle des systèmes en place. J’ai moi-même utilisé les services d’AirBnB en Europe lors de deux voyages. Franchement, j’ai adoré le confort d’un appartement meublé et équipé en lieu et place d’une chambre d’hôtel avec une clé sur le frigidaire et un décor délavé et inhabité. Je peux toutefois comprendre pourquoi il est nécessaire d’agir pour protéger les territoires contrôlés et les économies d’industrie dépassées. C’est plus facile de proposer des embûches à l’innovation que de reconsidérer les modèles obsolètes. En fait, nous vivons dans un monde où innovation ne rime plus avec révolution, mais avec l’idée de « reculons » puisque nous mettons les freins dès que le système en place est menacé. Forcément ne plus avancer équivaut à reculer. À la fin, tout se mesure aux votes… nous verrons bien ce que les citoyens en pensent!

Le partage pour qui finalement?

Si vous me suivez depuis longtemps, vous devez savoir que je suis une fervente défenderesse de l’économie de partage et de collaboration. J’en suis même une évangélisatrice depuis un bon moment, même lorsque le concept était encore difficile à saisir pour la plupart. À mon grand regret, le temps et l’expérience me démontrent toutefois que le mot « partage » est une très grande illusion qui sert les intérêts de quelques privilégiés seulement. Il y a d’abord les créateurs des modèles de collaboration qui empochent le pactole (leur fortune ne cesse de croître), je doute qu’il le partage avec ceux qui les enrichissent. Il y a ceux qui pensent faire une bonne affaire en trichant le système et en empochant des revenus non déclarés, qui ont même acheté des condos et loué des appartements pour en faire une entreprise grâce à AirBnB et autres solutions similaires. Il y a cette petite poignée de gens bien naïfs qui croient qu’ils participent à un grand projet à caractère communautaire et interplanétaire. Entre les deux, il y a les confus qui applaudissent la protection des systèmes en place, et qui voudraient quand même plus de souplesse pour accueillir des nouveaux modèles d’affaires… sans briser les vieux modèles évidemment. Au fond, personne n’a la solution parfaite et chaque vent pousse dans le sens contraire. Que faire?

Objectif : créer de la richesse pour tous!

Lorsque les idées d’UBER et AirBnB sont devenues réalité, j’avoue avoir été éblouie par l’idée. Tout semblait si logique, et les intentions si nobles. Mais dans ces modèles de refus des systèmes en place se trouve un ennemi commun à tous les systèmes : les opportunistes et les profiteurs. Louer son divan à un voyageur itinérant était une excellente idée. Demander au Brésil comment ils ont pallié à la crise du logement durant les jeux Olympiques! Acheter des dizaines d’appartements pour se convertir en chaîne hôtelière au détriment des aubergistes, et des capacités de logements déjà déficientes dans plusieurs villes était une bien moins bonne idée qui aura sonné le glas et attiré l’attention des législateurs qui préfèrent le bâton à la carotte. Même constat pour UBER, une tarification qui varie en fonction de la demande, des chauffeurs non contrôlés, des voitures non contrôlées, des frais de permis de taxis évités, des assurances inadéquates et la prétention de parler de partage en payant des chauffeurs en bas du salaire minimum. Le vrai partage et la vraie économie de collaboration n’échangent pas d’argent (ce n’est pas le but du moins), elle échange des services et du soutien. Lorsque sous le couvert de la collaboration on profite d’un flou pour faire de l’évasion fiscale et tricher la « collectivité » dans son ensemble pour son profit personnel en jouant selon des règles injustes, je pense qu’on s’éloigne des vertus dans le fondement initial de ces plateformes de collaboration.

De grâce, arrêtons de galvauder les mots « partage » et « collaboration » lorsque nous enrichissons de jeunes vautours élevés au rang d’ « innovateurs » qui se croient au-dessus des systèmes. Une formule de contribution volontaire aurait  vraiment défié le système ou la formule de troc (comme troc maison – Allo Stop!). D’ailleurs, pourquoi ne pas avoir mieux contrôlé les usages commerciaux? Ce n’est certainement pas avec cette façon déguisée de détourner tous les systèmes et de prétendre à l’innovation qu’on évolue. Ça s’appelle plutôt le saccage et la destruction lorsqu’on arrache les fleurs du voisin pour les mettre dans un vase, chez soi.

À quand une vraie économie de partage où seuls ceux qui ont envie de donner, donneront, et personne ne prendra au passage en dénaturant la vraie mentalité de collaboration? Je suis 100% pour l’innovation, mais en se détournant de leur mission première, les AirBnB et UBER de ce monde ont failli à leur propre promesse. Ils n’ont qu’eux à blâmer si les législations se renforcent à leur désavantage. Finalement, l’appât du gain n’échappe à personne, pas même les bohèmes créatifs tapis au fond du sous-sol rêvant d’un monde meilleur. Arrêtez de me faire pleurer, et allez prendre un verre à la santé de ceux qui en paient le prix en ce moment. Je suis déçue que leur manque d’autorégulation nous prive des bénéfices que la collectivité pouvait en retirer à l’origine. On dirait le titre d’un roman : « Comment détruire une bonne idée avec les mauvaises ». Lorsque je réserve sur AirBnB, je ne veux pas voir les commerçants, je sais où les trouver. Par contre, emprunter un logement habité et loué occasionnellement, j’en redemande! Et vous, les politiciens qui jonglent avec des systèmes désuets et des nouveaux modèles, mettez un peu plus de temps pour trouver des solutions innovantes plutôt que de protéger le statu quo!

Et vous, qu’en pensez-vous?

Blogue La Présence des idées

5 commentaires sur « L’économie de partage ou de saccage? »

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