Je pense que depuis le début de la pandémie, je suis de plus en plus marginale dans mon groupe d’amis et de relations professionnelles qui ne planifie pas de prendre sa retraite. Bon, c’est vrai, à mon âge, les amis sont plus âgés et bien sûr mûrs pour une retraite. J’ai passé une grande partie de ma vie, comme vous sûrement, à me faire vendre l’idée de la liberté 55 et aujourd’hui, je ne suis même pas certaine si je peux aspirer à la liberté 75! En fait, ce n’est même pas un rêve parce que la liberté est dans notre capacité à faire ce qu’on veut et je veux plus.
N’allez surtout pas croire que je n’ai pas planifié mon futur financièrement, moi qui ai aidé des centaines de personnes à planifier la leur dans mon ancienne vie de banquière. Non, ce n’est pas une question financière, même si travailler à mon compte m’a éloigné de mes objectifs financiers, ça m’a en contrepartie permis de comprendre que la retraite, c’est illusoire et qu’elle est un piège. Oui, un piège. Je n’ai aucune envie, si ma santé le permet, d’arrêter de créer et contribuer activement.
Je regarde la vivacité d’esprit de certaines vedettes de chez nous, qui ont largement dépassé 90 ans qui nous rappellent que la retraite est un concept à géométrie variable. Même la reine Elizabeth défie les lois de la nature. Si on veut vieillir en santé et en beauté (intérieure du moins), il ne suffit pas de troquer ses 20-30-40 prochaines années de vie pour un abonnement au golf ou sur un vélo pour faire du cyclo tourisme. La retraite, c’est au-delà de ça. C’est se re-traiter, c’est prendre nos connaissances, nos talents et recycler le tout en quelque chose de constructif et idéalement de redonner ce qu’on a reçu. C’est continuer de participer à la société de manière différente certes, mais surtout ne pas devenir un poids pour personne du moins un poids pour nous-même.
Je suis toujours sur le popotin lorsque je vois des médecins, des professeurs émérites, des menuisiers ou autres retraités aux métiers encore recherchés s’éteindre à petit feu dans les résidences âgées sans que leur précieux savoir ne vaille l’intérêt pour quiconque. Un savoir qui meurt un peu plus chaque jour à l’insu de tous.
Les peuples autochtones valorisent le savoir ancestral, les sages sont ce qu’une communauté a de plus précieux. Ce sont des passeurs, de véritables disques durs sur deux pattes qui copient leurs fichiers, pendant que leur mémoire est encore vive, aux générations suivantes. À l’inverse, notre société supposément moderne purge la mémoire de nos sages au nom de l’efficacité, la modernité et l’évolution. Étiquetés obsolètes, comme tout ce qui est fait pour ne pas durer dans ce monde de consommation. C’est un autre sujet, mais il est important de soulever que nous avons une méga perte d’opportunité et un rapport à la vieillesse qui ne peut pas rester comme il a été depuis des années.
Les technologies nous permettraient tellement de capitaliser sur leur aide, leur soutien via les écrans et autres moyens pour partager leur savoir. Nous avons besoin de coachs et la majorité n’a pas les moyens de se payer cette aide précieuse. Quelques initiatives émergent de plus en plus, mais il faut en faire une option claire pour des retraites semi-actives ou actives.
L’avenir appartient à tout le monde
J’ai eu plusieurs conversations récemment avec des personnes autour de moi qui pensent qu’arriver à la cinquantaine, c’est la fin des rêves. En fait, même chercher un emploi après 50 ans, c’est quasiment avoir la lèpre. Le parcours du combattant, difficile et désespérant, l’âgisme est un luxe que les entreprises ne peuvent plus se permettre. Nous pensons aux immigrants pour pourvoir les postes, mais combien de retraités auraient beaucoup à partager. Les grandes chaînes de restauration rapide l’ont bien compris. Les têtes blanches au service à l’auto sont monnaies courantes, voire souriantes.
En contrepartie, j’ai des exemples de courage avec deux amies qui ont repris des études après 50 ans, l’une en éducation spécialisée qui vient de graduer après 3 ans d’efforts acharnés et une autre pour devenir travailleuse sociale qui pète des « scores » et qui n’a jamais été aussi allumée de sa vie. Tu vas faire quoi gradué à 54 ans? Ce que j’ai toujours voulu faire, et si ce n’est que pour 15 ou 20 ans, et bien je ne mourrai pas avec des regrets. Voilà pour moi le signe que vieillir pour ma génération et la suivante ce n’est plus synonyme de se magasiner une retraite de touriste. Prendre une pause pour profiter de la vie, d’accord. C’est mérité, mais le temps est long en titi lorsque notre seul but est de frapper des balles et saluer le soleil chaque matin et plusieurs le réalisent après un moment. Remarquez que les aspirations de chacun sont bien personnelles, mais le point est que vieillir ne doit pas nécessairement rimer avec futilité. Les options sont nombreuses pour rester actif dans notre société.
la valeur du temps
J’ai commencé cet article avec une mise en contexte qui m’a donné le goût de changer le titre, mais non, je le garde. Je veux parler de la valeur du temps.
La loi de Parkinson est un principe dont j’ai parlé à quelques reprises dans ce blogue. Parkinson? Tout le monde pense immédiatement à la terrible maladie n’est-ce pas? Mais il y a aussi une autre maladie, celle du temps, la loi de Parkinson inspirée du nom de son auteur ( Cyril Northcote Parkinson). Le principe est simple : le temps s’étire ou se raccourcit selon la situation. Il a été prouvé que si vous donnez un mois à des fonctionnaires pour faire un rapport qui prendrait 3 jours normalement, ils réussiront à étirer le temps pour occuper leurs journées jusqu’à la fin du délai. D’ailleurs, si vous regardez autour de vous, partout cette loi s’applique dans notre système malade. Tout le monde veut justifier son temps, et pour ce faire, l’étirera, le réduira ou le manipulera pour le besoin. La pandémie a changé un peu le concept. Dorénavant l’élastique du temps est sur le point de rompre. Les niveaux de productivité ont basculé vers une utilisation du temps qui défie les lois de la nature, même celle de Parkinson.
En ces temps de pandémie, nous n’avons jamais eu autant de temps pour nous, pour les plus chanceux, et si peu, pour les moins chanceux. Au terme de cette pandémie, certains auront écrit un livre, fait un doctorat, une maîtrise, d’autres auront construit des meubles, appris une nouvelle passion, d’autres auront passé leur temps à chercher les poux dans la gestion de la pandémie, trop auront lu tout ce qui touche le « méga complot mondial » et seront devenus des complotistes invétérés. Chacun aura utilisé son temps à sa guise, mais le temps aura passé pour tout le monde, et il ne reviendra plus. Il y aura un avant et après pandémie, et certains seront plus prêts que les autres pour rebondir plus fort, plus enrichis.
Prenons maintenant l’effet positif de cette loi. Un ancien patron me disait toujours : si tu veux que quelque chose se fasse, demande à quelqu’un qui est occupé! Tellement vrai! C’est probablement ce qui explique que les dossiers figés dans le temps ou les urgences atterrissaient sur ma pile de travail. Regardez les superfemmes, même principe : peu de temps, beaucoup de choses à faire et pourtant tout se fait en général. La pandémie a mis en relief que pour éduquer les enfants, ça prend un village. Et si le village n’est plus là, il faut bien que le quotidien se fasse tant bien que mal. Le temps a changé complètement ses repères temporels depuis mars 2020. C’est hallucinant.
Faites-vous de l’argent sur le temps des autres?
Dans mon article initial sur la loi de Parkinson, je disais que les entreprises qui nous font perdre notre temps ne méritent pas notre clientèle. La pandémie a créé de nombreuses excuses prêtes à servir, encore ici, j’ai écrit un article à ce sujet. Oui, la pandémie a chamboulé les processus en entreprise. Mais soyons honnêtes, celles qui avaient des processus orientés sur le bénéfice client, peuvent encore bien servir leurs clients. Celles qui géraient selon le bénéfice entreprise ont dégradé leurs services d’une manière dont certains ne pourront jamais se relever. À force de couper partout, la pandémie a coupé dans les maillons faibles de ces entreprises. S’il y a une chose qui me fait rager, c’est bien d’être pendu au bout du fil pendant des minutes interminables sur mon temps, ou encore pire, de refaire un processus parce que mon courriel ou le formulaire ne s’est pas rendu à destination ou à cause d’un « bug » dans le site. Le summum me faire dire : « veuillez accepter nos excuses, avec la pandémie nos systèmes surchauffent!!!! ». Vous voulez dire vos systèmes sont inadéquats!
J’ai eu un problème avec « Best Bye » et une commande via leur place de marché. J’ai avalé ma pilule, mais je me suis promis que je ne retournerais plus sur ce site. Le phénomène du client qui ne dit rien, mais qui rompt avec l’entreprise, c’est exactement ça. Je n’ai pas une banque de temps illimitée, et ceux qui me le font perdre, me perdent.
Chaque fois que vous avez une décision à prendre en entreprise, comme dans votre vie, essayez d’imaginer les scénarios avec une projection dans le temps. Serez-vous content d’avoir investit votre temps à tel projet ou tâche dans x mois, x années? Ou à l’inverse, vous trouverez stupide d’avoir évité de le faire à cause que la perspective du temps vous semblait irréaliste ou parce que votre retour sur l’investissement semblait trop incertain?
Prenez le temps de réaliser vos rêves ou vos projets
Il n’est jamais trop tard pour réaliser ses rêves, mais il est toujours trop tard pour revenir en arrière. Il n’est jamais trop tard pour investir dans le service client, mais il est toujours trop tard pour récupérer un client. À l’ère de l’achat en ligne, la seule différence entre vous et les autres, c’est votre service.
La pandémie a remis les pendules à l’heure. La loi de Parkinson nous rappelle que la valeur du temps est bien relative. C’est fou comme cette pandémie a changé la perspective du regard que nous avons sur notre société. Notre rapport avec les personnes âgées, notre rapport avec l’éducation, notre rapport avec les plus vulnérables, entre la violence aux femmes et les enfants abandonnés dans le système, et l’itinérance ne sont que quelques enjeux qui devront à la pandémie d’être remontés sur le dessus de la pile. Plusieurs disent déjà : merci à la pandémie! Oui, je sais, les dommages collatéraux sont incommensurables, mais sur ce point, nous ne pouvons rien changer, il faut faire de la limonade avec nos citrons. Il ne reste qu’à utiliser votre temps à bon escient.
Bon printemps dans la pleine conscience de la valeur du temps, le vôtre et
celui de vos clients!

Bravo Sylvie ! Tellement vrai et inspirant pour stimuler l Action. Je partage