Toi Sylvie que penses-tu de la nouvelle tendance en ludification? Hein? Tu veux dire gamification? Non, ludification, c’est le mot en français pour le terme anglais plus connu qui vient du mot « ludique ». C’est une technique qui permet le transfert de la logique du jeu dans divers domaines. Plus exploitée dans l’univers virtuel avec les jeux vidéos et popularisée avec des sites comme Second Life, mais cette technique est aussi orientée vers des applications en situation d’apprentissage, en situation de travail ou plus spécifiquement dans les réseaux sociaux. Il semble que l’humain soit naturellement prédisposé au jeu et la ludification permet de rendre des activités monotones en quelque chose d’amusant. Les responsables du marketing dans une grande entreprise d’ici songent à instaurer cette stratégie pour séduire une certaine clientèle et aussi pour attirer les talents parmi les générations plus jeunes. Bonne question… j’y réfléchis et je te reviens! Quelques jours plus tard, ma réflexion s’articulait autour de ce billet.
Aimer jouer pour réussir : l’esprit de compétition ou d’équipe?
Il apparaît évident que les entreprises jonglent avec la difficulté d’attirer des talents et que toutes formes de créativité pour combler cette lacune deviennent alléchantes. Nous savons tous que l’univers des jeunes est nourri de jeux vidéo depuis leur tendre enfance. Les plus grands consommateurs de jeux vidéos de tous les temps, avec les XBox, les Nintendo, les Wii et j’en passe, sont les jeunes qui ont grandi avec l’habitude de l’écran et de la manette. Ils font vivre une industrie milliardaire en exigeant des animations de plus en plus sophistiquées pour satisfaire leurs attentes grandissantes. Faut-il s’étonner que les dirigeants cherchent à exploiter cette nouvelle tendance à tourner tout en jeux? Bien sûr que non et je comprends très bien le phénomène. Nous cherchons à simplifier tout dans nos vies et la tentation est grande pour mettre nos vies au diapason du jeu. Ce qui m’inquiète dans cette approche, c’est justement cette tendance à vouloir tout réduire au niveau du jeu comme si travailler ou s’acquitter de ses tâches quotidiennes était une corvée au point de vouloir en faire un jeu. Un peu comme si nous avions 3 ans et demi. Paresse intellectuelle? Paresse tout court? Opportunité de s’amuser tout en travaillant? Il faut admettre que la ludification impose des défis de taille sachant que l’essence du jeu contient aussi des ingrédients nocifs tels que la dépendance causée par le désir de gagner à tout prix pour certains et pour d’autres le désir de s’évader. Combien d’entre vous aiment jouer juste pour participer et faire partie de l’équipe? Pourquoi jouer si c’est pour perdre? Bien des questions qui refroidissent l’ardeur de jouer. Au fond, nous avons tous un enfant en nous qui sommeille et qui préfère l’insouciance du jeu à la dure réalité du quotidien d’où le désir de nous transformer en joueur plutôt qu’utilisateur!
Catégories de ludification : technique de manipulation pour convertir en joueur!
Jules César le disait déjà avant Jésus-Christ : donnez-leur du pain et des jeux! Certainement encore vrai aujourd’hui, il est facile de comprendre le désir de passer des messages en utilisant le jeu et surtout de prétendre nous faire jouer afin de nous endoctriner davantage, même Machiavel serait d’accord. Voici quelques exemples qui ne sont pas seulement issus du virtuel :
- La ludification s’exprime par le désir de gagner des points : pensons à Air Miles ou à AéroPlan.
- La ludification se manifeste dans l’action de collectionner : rappelons-nous les cartes de hockey ou la tactique des boîtes de céréales pour enfants et aujourd’hui FourSquare et Farmville
- Même les échanges entre joueurs deviennent de l’or : pensons au jeu vidéo de groupe ou au Scrabble en ligne
- La ludification au service de la rétroaction pour obtenir une réponse ou une adresse courriel : le Web est truffé de ces demandes de vos adresses en échange d’une récompense valable ou pas.
- Personnalisation du service et ludification font aussi bon ménage : particulièrement avec les outils virtuels, il est possible de vous faire croire que l’on vous connaît. Allez voir Mind Bloom qui montre un exemple éloquent de la construction d’un scénario de personnalisation.
Ludification et Présence : un défi possible avec la bonne intention!
Sachant que les styles d’apprentissage se répartissent de 65% visuels, de 30% auditifs et de 5% kinesthésiques dans la population, je m’étonne de constater un tel engouement pour la ludification. En effet, les kinesthésiques sont les plus susceptibles d’apprécier cette méthode d’apprentissage et ils sont peu nombreux. Si les entreprises souhaitent faire un usage optimal de la ludification, je serais tentée de les mettre au défi de trouver un moyen de se rapprocher véritablement de leurs clients et employés en utilisant adéquatement ces techniques afin de permettre à leurs employés et clients de contribuer constructivement à leur amélioration continue. En d’autres termes, inviter les entreprises à se servir de l’intrigue, des défis, des récompenses, de la recherche d’un statut ou même du désir de faire partie d’une communauté pour ouvrir la communication bidirectionnelle avec les humains qui les entourent. À ces conditions, la ludification pourrait s’avérer un outil de Présence hors pair pour rapprocher tout le monde dans l’organisation et retenir les clients chez vous. Si la ludification s’ajoute à l’arsenal de manipulation unidirectionnelle, je dis non… mais si nous en profitons pour faire mieux dans nos relations clients et employés, je dis OUI!
Avez-vous une opinion à ce sujet? Que vous inspire la ludification? Êtes-vous prêt à devenir des joueurs plutôt que des utilisateurs?