Le piège des raccourcis : une productivité imaginaire ou réelle?

Je me vois, toute jeune, essayer de débarrasser la table en tentant d’en apporter le maximum à la fois pour sauver du temps et j’entends encore mon père me dire : arrête de faire des voyages de paresseuse, tu vas finir par échapper quelque chose! C’était sa façon à lui de me dire qu’à vouloir épargner du temps parfois nous en perdons! J’ai grandi avec l’obsession de ne jamais perdre mon temps et de maximiser tout ce que je fais pour que tout soit efficace. Pour certains, c’est tout naturel et vous hochez la tête en vous disant : moi aussi! Et comme moi, vous ne pourriez imaginer les choses autrement. Il y a même des gens qui gagnent leur vie en vendant des solutions pour être plus efficaces et plus productifs et d’une certaine manière j’en suis! Des logiciels, des livres, des formations, de l’information, dont Stephen Covey qui a fait fortune avec ce genre de formule. Je suis effectivement de celle qui croit que les technologies peuvent nous aider à être plus efficaces si nous savons comment les adapter à notre réalité et non l’inverse. Je dirais même que c’est l’obsession des entreprises d’être plus productives afin d’encaisser plus de profits avec le moins de ressources possible. Pas toutes certes, mais celles qui le font ne savent plus s’arrêter et celles qui ne le font pas, ne savent pas par où commencer!

La maladie des raccourcis : une plaie qui envahit nos vies !

Bien avant les technologies, nous avions cette tendance toute naturelle à chercher des moyens de prendre le chemin le plus court pour arriver au même résultat. Je crois honnêtement que c’est sain et que de ne pas le faire serait même un peu stupide à mon avis. Mais avouons qu’avec les technologies, nous atteignons chaque jour de nouveaux sommets dans le paroxysme du raccourci dans une ère où nous n’avons jamais eu autant de tue-temps de tous acabits. Twitter a certainement réinventé la communication en mode de raccourcis. À mon avis, c’est le summum dans la recherche du plus court chemin, réinventer la communication en 140 caractères. Pour moins, on se croirait à l’époque des Indiens et des signaux de fumée.  D’ailleurs, c’est le même phénomène avec les jeunes, un langage sténographique serait trop dire de ces échanges abrégés, codés, tronqués et au final quasi incompréhensibles aux néophytes que nous sommes. Même les adresses URL sont raccourcies avec des logiciels qui transforment les longues adresses en quelques caractères comme bit.ly. Si nous ajoutons à cela, les touches de type raccourci de notre micro-onde, de notre iPhone, de notre téléviseur et j’en passe, disons qu’il y a de quoi se perdre dans le labyrinthe des raccourcis. Il n’est pas étonnant que nous utilisions à peine 10 % des capacités de nos outils technologiques.

Mais allons-nous plus vite pour autant?

La question est légitime, mais difficile à répondre. L’attitude du plus court chemin est aussi le propre des performants qui ne sont jamais satisfaits de leur performance. Plus vite, mieux, à moins de coût, cette course effrénée aux profits est essoufflante.  Je pense sincèrement que plusieurs raccourcis sont maintenant de l’ordre du normal. En d’autres mots, il serait difficile de revenir en arrière sans affecter notre temps disponible. Mais, je pense que de façon générale, nous rendons notre cerveau paresseux. J’étais un vrai bottin téléphonique avant mon iPhone, je savais tous mes numéros de téléphone par cœur (les plus fréquents évidemment) et maintenant, il y a peu de gens que je pourrais appeler sans mon bottin électronique. Nous sommes à un clic de tout et les designers continuent de mettre leur génie au service de la paresse intellectuelle. Déjà, on ne sait plus compter à la main, écrire sans correcteur, penser sans gourou et planifier sans agenda, est-il possible que nous puissions sauver encore plus de temps avec les attaches du sac vert intégrées dans le design? Ou se brosser les dents plus vite avec la brosse électrique? Tout ce temps épargné sert à quoi au final? Poser la question aux entreprises aux prises avec le phénomène des téléphones intelligents au travail et vous aurez une idée ou encore à une conjointe exaspérée par le iPad ou le iPhone de son bien-aimé dans la chambre.

Esclave d’une productivité imaginaire ou réelle?

Il y a deux ans, j’ai installé avec un partenaire, un logiciel ERP dans une entreprise. Toutes les tâches répétitives que les répartiteurs accomplissaient à 5, ce sont envolées. Le président a choisi de transformer ces ressources en valeur ajoutée pour le développement de l’entreprise. J’étais étonnée et agréablement surprise de voir l’intelligence dans ce choix. Je vois tous les jours des formations pour que les gestionnaires « gestionnent » plus vite et mieux grâce aux outils « raccourcis ». J’entends chaque semaine des gens se plaindre que tout va trop vite. Dans le milieu, il y a ceux trop occupés à prendre des raccourcis et à découvrir des trucs de productivité tels des obsédés du temps comme le lapin pressé dans Alice au pays des merveilles, ou le Businessman qui calcule tout dans le Petit Prince. Peut-on dire lequel parmi tous ces profils est le plus productif à la fin du  jour? Seuls les résultats démontrent si nous sommes efficaces ou pas. Plus exactement, si nous avons fixé des choses à faire c’est bien, si nous les avons faites c’est encore mieux, mais si nous avons oublié pourquoi nous le faisons réellement ou pour qui, c’est malheureux! Chaque fois dans ma vie que j’ai pris des raccourcis, j’ai découvert de nouvelles choses sur ma route, mais j’ai rarement épargné du temps… j’ai transféré du temps sur autre chose. Aujourd’hui demandez-vous si tous vos raccourcis vous offrent du temps pour découvrir de nouvelles avenues et l’utiliser à créer ou si les raccourcis vous donnent simplement l’impression d’être productif et efficace afin de perdre du temps ailleurs?

Partagez vos réflexions à ce sujet et dites-nous comment vous utilisez le temps épargné en raccourci! Êtes-vous plus Présent pour autant?

Sylvie Bédard

2 commentaires sur « Le piège des raccourcis : une productivité imaginaire ou réelle? »

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